la Colline inspirée

la Colline inspirée

jeudi 19 juin 2014

À chacun sa vérité... ?


À chacun sa vérité... ?
La plus détestable surprise, quand on a dûment enregistré un article qu'on a apprécié, est de tomber sur du vide, le si précieux texte ayant été supprimé par la revue ou le site d'origine. 
Il serait bien dommage de voir disparaître l'échange pour le moins musclé d'un côté, apathique et flou de l'autre, qui a salué la parution de la Supercherie dévoilée. Comme il fallait s'y attendre, les Alisiens, qui n'ont pas ouvert le livre, s'en prennent à la thèse Berthier sans s'être avisés qu'il n'en était pas du tout question, le premier volume du diptyque prévu étant exclusivement consacré à l'étude des preuves apportées jadis et naguère pour conforter la localisation d'Alésia à Alise Sainte-Reine.

Aussi avons-nous transcrit cette esquisse de duel pour le communiquer à tous ceux qui ne l'ont pas trouvé ou l'ont cherché trop tard. 

******

Franck Ferrand ouvre le feu sur FigaroVox le 19 mai 2014 à 9h.40 :

Site d'Alésia : admettons la vérité

FIGAROVOX - Le site de la bataille d'Alésia n'est pas en Bourgogne, mais dans le Jura, plaide cette semaine notre chroniqueur Franck Ferrand
Journaliste, écrivain et conférencier, Franck Ferrand consacre sa vie à l'Histoire. Il est l'auteur de nombreux ouvrages dont Le dictionnaire amoureux de Versailles (Plon, 2013). Ce surdoué anime Au coeur de l'Histoire chaque jour sur Europe 1 et L'Ombre d'un doute chaque mois sur France 3 en première partie de soirée.
____________

« L'ouvrage collectif que je viens de préfacer, aux éditions Pygmalion, sous la direction de Danielle Porte, est de ceux qu'on a longtemps attendus, et qu'on déguste ligne à ligne, empli de gratitude envers les auteurs. Enfin, voici répertoriés tous les travers, tous les défauts, toutes les tares de l'Alésia officielle, sise en Bourgogne, en Côte-d'Or, sur la commune d'Alise-Sainte-Reine.

 Depuis un siècle et demi - depuis que Napoléon III, par la grâce d'un décret impérial, a décidé que l'on situerait la victoire de Rome sur les Gaules en Bourgogne, dans le pays des anciens Eduens - de nombreux savants, dont certains de grand poids, se sont manifestés pour dénoncer au mieux une erreur, au pire une supercherie. Leurs arguments sont de trois ordres:
- d'abord, ils font remarquer que le site bourguignon du Mont Auxois ne correspond en rien - en rien! - à la description détaillée qu'en donna Jules César, au Livre VII de sa Guerre des Gaules ;
- ensuite, ils soulignent les incohérences et les invraisemblances de ce site, trop petit, trop bas, trop ouvert, trop mal doté en eaux vives notamment ;
- enfin, ils rappellent que la conformation des lieux ne permet ni de situer, ni de comprendre les différentes étapes de l'affrontement censé s'y être livré, en 52 avant JC.
Qu'importe aux pontes de l'archéologie nationale ; il y a longtemps qu'ils ont fait fi de toutes ces critiques.
Depuis cinquante ans - depuis qu'un certain André Berthier a découvert, en plein Jura, dans le pays des anciens Séquanes, un site qui, lui, correspond en détail, trait pour trait, à la description fournie par César - les critiques à l'encontre du site bourguignon se sont faites plus pressantes.
Qu'à cela ne tienne: le mépris et la morgue des prétendus détenteurs du savoir n'ont fait que croître en proportion.
De sorte qu'à force de négliger les textes et de les modifier, de distordre les réalités du terrain et d'interpréter abusivement les résultats de fouilles orientées, on en est venu à présenter comme une vérité établie ce qui, pour un esprit exigeant, apparaît comme impossible: la mythique Alésia se situerait en Bourgogne. Et que cesse la polémique!
Seulement voilà: hélas pour les ennemis de la logique, certains chercheurs sont têtus. C'est le cas de la petite équipe de militaires, d'ingénieurs, d'hydrauliciens, de numismates réunis par Danielle Porte, l'une des meilleures latinistes de la Sorbonne. Avec ordre et méthode, minutieusement - mais non sans humour - ces amoureux des faits posent aujourd'hui plusieurs dizaines de questions dérangeantes aux partisans du «grand site national» d'Alise-Sainte-Reine ; ils prouvent au passage qu'il convient désormais d'aller chercher ailleurs les vestiges du siège et les traces de la bataille.
Tant pis pour le complexe touristique du MuséParc Alésia, bâti depuis quelques années au mauvais endroit, à grand renfort de fonds publics! Tant pis pour les innombrables ouvrages écrits sur de fausses bases, et pour les datations hasardeuses que cette errance aura suscitées!
L'essentiel, me semble-t-il, est que la vérité historique puisse enfin se faire jour.

PS: A ceux qui se demanderaient quelle importance peut avoir la localisation d'un événement vieux de plus de 2000 ans, je répondrai ceci: Alésia est un des épisodes fondateurs de l'histoire occidentale ; le resituer au bon endroit permettrait non seulement de mieux comprendre un événement jusqu'ici bien confus, mais de restituer leur importance à des ruines protohistoriques - celles de l'Alésia des Mandubiens - parmi les plus riches d'Europe. Actuellement, ces vestiges cyclopéens, perdus dans le Jura, sont désignés sur la Carte archéologique comme autant de «tas d'épierrement» et de «limites de parcelles agricoles» (sic)! »
******

Les historiens partisans d'Alise répondent sur FigaroVox le 27 mai 2014 à 10h.25 :

Non Franck Ferrand, le site d'Alésia n'est pas une "supercherie"

FIGAROVOX/TRIBUNE - Trois chercheurs répondent à notre chroniqueur Franck Ferrand qui affirment* que le site d'Alésia n'est pas en Bourgogne, mais dans le Jura. Querelle d'historiens sur une bataille historique !

Jean-Louis Brunaux est directeur de recherche au CNRS, auteur de 27 septembre 52 av. J.-C. Alésia, Gallimard, 2012
Yann Le Bohec est professeur émérite à l'université Paris IV-Sorbonne, auteur de Alésia, 52 avant.J.-C. , Tallandier, 2012
Jean-Louis Voisin est maître de conférences honoraire de Paris XII, auteur de Alésia, un village, une bataille, un site, Editions de Bourgogne, 2012.
____________

« Télévision, chronique, radio, préface, Franck Ferrand est partout pour «dévoiler une supercherie»: Alésia se situerait non pas en Bourgogne, au Mont Auxois, sur la commune d'Alise-Sainte-reine, mais dans le Jura à Syam et à Chaux-des-Crotenay. Une telle énergie mériterait un meilleur usage. Car il se trompe. Totalement. Avec obstination.
Une simple querelle d'érudits? Non pas. Selon lui «il s'agit de la plus grande controverse historico-archéologique de ce début de siècle». Soit. Remarquons déjà qu'en dehors de quelques personnes groupées autour de Franck Ferrand et de Danielle Porte, cette querelle n'émeut aucun historien de l'Antiquité en France et hors de France: le Barrington Atlas du monde grec et romain édité par l'université de Princeton qui fait autorité en la matière situe Alésia là où elle doit être, au Mont Auxois. Et personne parmi les archéologues et les spécialistes de l'Antiquité n'a pensé à rectifier cette localisation. Des «mandarins», rétorqueront Franck Ferrand et consort. Une histoire «officielle», un «complot» pour étouffer une voix discordante …
Nous n'avons jamais eu cette prétention. Si nous cosignons cette chronique, ce n'est pas à la suite du «comportement grégaire» que Franck Ferrand décèle parmi les universitaires, mais plus simplement parce que nous sommes animés par la recherche de la vérité historique et par la prise en compte de réalités archéologiques que les détracteurs du Mont Auxois se refusent d'accepter. Nos démarches ont été différentes et nous n'avons pas travaillé de concert. Mais nos conclusions sont identiques: Alésia est au Mont Auxois, et nulle part ailleurs. Pourquoi?
Il y a certes le texte de César. À propos du passage concernant le site de la bataille d'Alésia, l'un de ses commentateurs les plus critiques, Michel Rambaud, relève: «Le récit césarien ne fournit que les données militaires de la manœuvre, et en termes généraux. (…) De là des querelles où seule l'archéologie peut entraîner la décision». Dont acte.
Contrairement à ce qu'affirme Franck Ferrand, Napoléon III n'a pas décidé «par la grâce d'un décret impérial» qu'Alésia se situerait en Bourgogne. Il y avait une querelle entre deux sites, Alaise et Alise. Et ce n'est qu'après un examen attentif de chacun d'eux que les fouilles commencèrent et se firent avec les techniques de l'époque. Pourquoi, vouloir à tout prix parler de manipulation, d'incompétence, de falsification plutôt que d'examiner, ce qu'ils ne font jamais, les résultats des fouilles? Une obsession chez les partisans de Syam: les mêmes reproches sont formulés à l'égard de l'équipe franco-allemande qui a approfondi et précisé nos connaissances lors des fouilles de 1991 à 1997!
Pourtant l'ensemble des découvertes est impressionnant: un murus gallicus ; des camps et lignes de fortifications romains ; un important stock d'armes (aucun site antique n'en a livré autant), varié et homogène dans sa datation (le milieu du Ier siècle av. J.-C.) avec des balles de frondes où se lit le nom de Labienus, le lieutenant de César ; des ossements de chevaux gaulois, romains et germains, l'image même des différentes cavaleries engagées ; 731 monnaies gauloises représentant les différents peuples qui composent l'armée de secours avec deux monnaies qui portent le nom de Vercingétorix et qui sont les seules trouvées hors du territoire arverne, 144 monnaies romaines antérieures à 53. S'ajoutent à cela une tradition littéraire unanime du IXe siècle jusqu'en 1855, des inscriptions avec les noms d'Alisiia, d'Alisienses qui correspondent au nom latin d'Alesia donné par Pline l'Ancien, puis par l'évêque d'Auxerre Germain.
Rien d'équivalent sur le site de Chaux-des-Crotenay déterminé par André Berthier grâce à la méthode dite du portrait-robot. Difficile d'imaginer dans ce site étroit une rencontre militaire d'au moins trois cent mille hommes, difficile encore de penser que Vercingétorix qui attend une armée de secours venant de l'ouest ait laissé à César le loisir de couper ses voies de communication. Quant aux fouilles sur place (cinq campagnes, neufs sondages plus cinq campagnes de sauvetage), elles ont rassemblé un matériel qui n'est pas négligeable: plus de 3 000 objets métalliques, plus de 5 000 tessons de céramique. À la demande et sous le contrôle de l'Association «ArchéoJuraSites», dépositaire du fonds Berthier, ce matériel a été analysé en 2011. Résultats? Le métal n'est pas antérieur au IIe siècle de notre ère et ne comporte aucun mobilier militaire d'époque gauloise ou romaine, la terre cuite protohistorique (l'époque du siège) ne représente que 2,6% du total. En un mot, aucune bataille mettant aux prises Gaulois et Romains ne s'est déroulée dans cette région à la fin de l'été 52 av. J.-C. Mais tout cela n'intéresse guère Franck Ferrand.»
******
Franck Ferrand riposte sur FigaroVox le 30 mai 2014 à 10h.50 :
Site d'Alésia : la mauvaise foi des mandarins

FIGAROVOX/HISTOIRE - Le site de la bataille d'Alésia est bien dans le Jura, persiste Franck Ferrand. Notre chroniqueur répond aux universitaires Jean-Louis Brunaux, Yann Le Bohec et Jean-Louis Voisin qui situent Alésia en Côte d'Or.

Journaliste, écrivain et conférencier, Franck Ferrand consacre sa vie à l'Histoire. Il est l'auteur de nombreux ouvrages dont Le dictionnaire amoureux de Versailles (Plon, 2013). Ce surdoué anime Au coeur de l'Histoire chaque jour sur Europe 1 et L'Ombre d'un doute chaque mois sur France 3 en première partie de soirée.
____________

« A l'instar de Ping, Pang et Pong, les ministres essoufflés et frustrés du Turandot de Puccini, MM. Brunaux, Le Bohec et Voisin cosignent ce qu'ils pensent être une riposte à ma chronique pour FigaroVox du 19 courant: en vérité, un amas de généralités qu'on pourrait croire tirées d'une brochure touristique. Et - la référence à Jules César balayée d'un revers de main - revoici la vieille commission Coignart de Saulcy, revoilà les vieilles monnaies sujettes à «tripatouillages» (Colbert de Beaulieu dixit), revoilou le pot-pourri des balles de fronde et des ossements de chevaux - soupirs…
Ayant égrené pour la énième fois ces raisons élimées jusqu'à la corde, nos trois mandarins concluent que «tout cela n'intéresse guère Franck Ferrand». Comme ils ont raison!
Ce qui intéresserait Franck Ferrand, c'est un vrai débat sur le site officiel d'Alise-Sainte-Reine ; sur ses incohérences par rapport aux textes anciens ; sur ses incongruités topographiques ; sur ses impossibilités au regard de la stratégie et, tout simplement, du bon sens. Un débat sur la difficulté de situer le Mont Auxois en pays séquane - Ping? Sur la difficulté de justifier la présence de camps romains - irréguliers dans leur forme et beaucoup trop petits - hors des prétendues lignes de défense césariennes - Pang? Sur la difficulté de loger plus de cent mille hommes à l'intérieur des 97 hectares du soi-disant oppidum - Pong?
Ce qui intéresserait Franck Ferrand, c'est une réponse - ou un commencement de réponse - aux questions posées à nos «Alisiens» par les auteurs de l'ouvrage: «Alésia, la supercherie dévoilée». Interrogations pertinentes et toujours en suspens sur l'emplacement, la structure, les dimensions du grand fossé d'arrêt ; sur l'espacement - fort aléatoire en Bourgogne - des tours décrites par César ; sur l'absence, dans un périmètre crédible, d'une plaine susceptible d'accueillir un premier engagement de cavalerie…
Mais de débattre, il n'est jamais question chez les amis du MuséoParc ; pas plus que de proposer la moindre réponse - et pour cause! Quand on est tout dépourvu d'arguments, la seule attitude possible est le survol approximatif et le gloussement satisfait. N'évoquons même pas le site jurassien, que les trois signataires ignorent au point de le croire «étroit» (sic) : plus de mille hectares, excusez du peu! Et passons sur les fameuses expertises de 2011, à propos desquelles il y aurait tant et tant à dire…
Reste l'ultime, le hideux argument: l'argument d'autorité. Brunaux-Ping, Pang-Le Bohec et Voisin-Pong se drapent dans leurs titres, se gargarisent de la doxa et constatent que «le Barrington Atlas du monde grec et romain édité par l'université de Princeton qui fait autorité en la matière situe Alésia là où elle doit être, au Mont-Auxois.» Ici, faut-il rire ou pleurer? Voilà bien nos savants à nous: frileux et suivistes, tout juste bons à attendre un verdict de la bouche de leurs confrères anglo-saxons. Qu'à cela ne tienne! Je gage, au rythme où vont les choses, que Princeton sera dessillée plus tôt que la Sorbonne. »
******
Danielle Porte intervient de son côté sur FigaroVox le 30 mai 2014 à 16h.58 :

Alésia : pourquoi l'archéologie ne prouve rien

FIGAROVOX/TRIBUNE - La bataille d'Alésia n'est pas terminée. Interpellée par des confrères dans FigaroVox, l'historienne Danielle Porte, auteur de Alésia, la supercherie dévoilée, leur répond.

Danielle Porte, latiniste et historienne, est spécialiste de l'Antiquité romaine, en particulier de la religion romaine et des époques césarienne et augustéenne. Elle est l'auteur d'Alésia, la Supercherie dévoilée.
____________
« Qu'il me soit permis, en tant que directeur d'ouvrage et auteur, universitaire moi-même (maître de conférences Docteur d'État à Paris IV-Sorbonne e.r.), auteur de l'Imposture Alésia 1 & 2 (2004 et 2010) et de Vercingétorix (2013), de répondre à mes estimables collègues au sujet du livre Alésia, la Supercherie dévoilée, ouvrage collectif que j'ai dirigé.
Il est navrant de lire sous leur plume les éternels poncifs concernant Alésia, et surtout de constater qu'ils répondent à un livre qu'ils n'ont même pas ouvert, tant cette «réponse» tombe chaque fois à contretemps.
Ils critiquent l'hypothèse Berthier? J'ai pris soin pourtant d'enlever du livre le nom-même de Chaux-des-Crotenay pour empêcher les «Alisiens» de botter en touche, selon leur habitude, et de parler de Chaux alors que nous les interrogeons sur Alise. A quoi bon polémiquer sur une absence?
Ils regrettent que nous ne connaissions pas le site d'Alise et son archéologie? («Au lieu d'examiner, ce qu'ils ne font jamais, les résultats des fouilles?»). Nous avons pourtant dépensé 426 pages à examiner point par point tous les détails de cette archéologie, tant d'après les ouvrages de M. Reddé et de J. Le Gall que d'après le volumineux Rapport de fouilles M. Reddé / S. von Schnurbein.
J'avais écrit en conclusion du livre: «Alise, que répondez-vous?... Rien? On s'en doutait un peu». Je ne croyais pas si bien dire!
Car les partisans d'Alise n'ont rien à répondre, et de fait ne répondent pas, à des réalités qui dérangent grandement leur hypothèse. Les spécialistes qui ont rédigé le grand Rapport de fouilles émettent systématiquement des doutes sur leurs propres trouvailles. Le projet culturel du Muséoparc l'avoue lui-même «L'archéologie n'a pas livré l'argument absolu qui permet d'identifier le site d'Alise-Sainte-Reine avec celui de l'Alésia de César. Mais, comme toute science expérimentale, l'archéologie a permis de mettre en évidence un certain nombre de faits objectifs. Pris isolément et pour eux-mêmes, ces faits ne prouvent rien.»
Comment peut-on soutenir ensuite que les fouilles prouvent absolument que le site officiel soit le bon? Nous avons relevé toutes les contradictions et aveux d'impuissance dans notre livre.
Oh! si, nous avons étudié le site d'Alise, et même à la loupe.
Ne nous ayant pas lus, ils reprennent comme probants des arguments que, justement, nous réfutons dans le livre. Ils reproduisent à l'identique les catalogues de trouvailles énumérées cent fois et réfutées autant… souvent par les Alisiens eux-mêmes! Chacune des critiques que nous avons formulées à ce sujet est accompagnée de sa référence.
Je relèverai sur mon blog - ce sera long - toutes les hérésies proférées par les Alisiens pour secourir Alise, et dont la reconnaissance n'entraîne pas l'ombre d'un doute. Telle la traduction de in longitudinem, «en longueur», par (3000 pas) de large (Y. Le Bohec, p. 148). La plaine d'Alise étant en largeur, il faut bien que César l'ait écrit… tant pis pour son texte! Et tout à l'avenant…
L'argument majeur est l'unanimité de la «communauté scientifique» sur la localisation d'Alésia. Riposte facile avec la condamnation de Galilée… Seul contre tous, il avait pourtant tout à fait raison: la terre tourne bien, jusqu'à présent, autour du soleil ; sauf pour quelques-uns.
«L'archéologie peut seule entraîner la décision»? Sûrement pas celle d'Alise, dont les invraisemblances sautent aux yeux et dont les tricheries sur armes et monnaies ont été dénoncées depuis Napoléon III - à ce propos, les statères d'or ne proviennent pas d'Alise mais d'un village proche de Clermont-Ferrand. On le sait depuis plus d'un siècle.
Mais tout cela n'intéresse guère ni J.-L. Brunaux, ni J.-L. Voisin, ni Y. Le Bohec. Mieux vaut la foi du charbonnier. »


******

Et depuis ?

Depuis ? Rien. Comme je l'ai dit, il n'y a rien à attendre, dans tous les sens de l'expression, d'historiens qui se drapent dans leurs certitudes sans daigner jamais s'informer sur les arguments que peuvent avancer les opposants au dogme. 

Le wait and see est-il de bonne guerre ? Si fuir le combat est une preuve de courage, alors, oui, sans doute. Est-il efficace ? Oui, encore... mais cette efficacité s'achète au prix du doute et du soupçon, immédiats ou à long terme, de ceux qui se seront informés. Est-il une preuve d'habileté ? Non. Du moins, pas pour longtemps. L'illusionniste ne soutient pas facilement sa forfanterie, le prestidigitateur lasse vite son public s'il n'a rien dans son chapeau.

Tant qu’on ne montre pas au public le fond du chapeau en le tournant vers lui, on peut toujours affirmer qu’il est plein. Plein de vide, il va de soi ; mais si les spectateurs attentifs exigent de voir ce vide, qu’arrive-t-il ? On ne peut pas éternellement berner un public sans qu’il crie à l’imposture ou à la supercherie. Justement. 

La seule arme des partisans du site officiel ? La dérision et la perfidie... qui ne sont toujours pas des réponses. Une citation suffira, qui concerne les hypothèses comtoises : « Une quarantaine de sites au minimum. Sans compter les Alesiæ potentielles (près de 4000!) et celles qui surgissent un été et qui disparaissent avec les feuilles, à l'automne. Le but est rarement scientifique. Il faut faire parler de soi, de sa localité, allécher le chaland, attirer le touriste. Car le nom d'Alésia est "porteur", comme l'on dit. Avoir chez soi la première page de l'histoire de France est un privilège qui rapporte gros. Aussi, les élus ne se privent pas de soutenir des initiatives et des revendications locales qui ne reposent archéologiquement sur rien mais qui pourraient transformer un site inconnu en un "lieu de mémoire". On ne sait jamais, des curieux peuvent se déplacer. » (J.-L. Voisin, Alésia, un village, une bataille, un site, 2012, p. 164).

Impudence et imprudence à la fois.
Lire, sous la plume d'un Alisien : « Avoir chez soi la première page de l'histoire de France est un privilège qui rapporte gros » est puissamment divertissant lorsqu'on songe aux intérêts économiques brassés par le Muséoparc, dont nous entretient presque quotidiennement la presse, tant sur papier que sur Internet, au point que pour les « Bourguignons » la question financière a totalement éclipsé les problèmes historiques. Serait-ce une belle illustration du proverbe fameux sur la paille et la poutre ?

« Il faut faire parler de soi, de sa localité, attirer le chaland… » Sait-on bien que, dans leur immense majorité, les partisans « du Jura » ne sont pas originaires, justement, du Jura, ?

Quant aux élus... qui « ne se privent pas de soutenir des initiatives et des revendications locales »... dans le Jura... on croit rêver ! Toutes nos démarches auprès des dirigeants du Conseil Général, du Régional, des Maires etc. se heurtent à la même réponse : « les fouilles pratiquées à Alise Sainte-Reine ont amplement prouvé qu'elle est le véritable site d'Alésia ». La dernière tentative, l'hiver 2013, auprès du Président du Conseil Général du Jura (à Lons-le-Saunier) a vu remonter nos demandes jusqu'au ministère. Réponse rapide de Mme Fillippetti : elle engageait le Président à s'informer auprès de la DRAC s'il désirait des précisions supplémentaires, puisque les fouilles d'Alise avaient prouvé que... L'antienne ordinaire. Retour à la case Départ...

De toute évidence, le tourisme et la manne financière qu'il draine intéressent bien plus l'opulente Bourgogne qui, pour les protéger,  s'accroche bec et ongles à son Muséoparc, que la secrète et farouche Franche-Comté qui se fait, elle, du tourisme à prévoir, un épouvantail.

Même pour verser dans la caricature, il faut savoir dessiner. Même pour manier la dérision, il faut se renseigner. Sinon l'on risque de faire rire... à ses dépens. 
____________

Note * : Telle qu'elle est écrite, la phrase "qui affirment* que le site d'Alésia n'est pas en Bourgogne mais dans le Jura" semble signifier que la localisation jurassienne est revendiquée par les historiens d'Alise. Ce pluriel est plutôt singulier.
Note ** : En revanche, le mépris des autorités intellectuelles n'empêche pas le bon sens de progresser et les doutes de s'infiltrer... un peu partout. Il est courant de voir à présent sur les cartes, les notices, les articles, qu'Alise est le site "présumé" d'Alésia. Ne serait-ce que pour cela, nous aurons fait du bon travail.
  
  

























lundi 9 juin 2014

« Ils ont des yeux pour ne pas voir… »


« Ils ont des yeux pour ne pas voir… et des oreilles pour ne pas entendre... »

Avant de construire, il faut démolir ; avant d’exposer une hypothèse nouvelle, il convient d’effacer celle qui, jusque-là, occupait le terrain puisque, si l’on prétend la remplacer, c’est que, de quelque manière, elle ne convient pas.

Encore faut-il, pour échapper à l’accusation d'être des démolisseurs partisans ou qui s’escrimeraient contre une thèse officielle pour le seul plaisir d’une contestation systématique des « vérités » établies, expliquer pourquoi l’on conteste, et argumenter sa position.

C’est ce que nous avons voulu faire en composant un ouvrage collectif destiné à démontrer en quoi l’identification d’Alésia avec Alise-Sainte-Reine ne saurait contenter ni le respect des textes latins et grecs, ni les exigences historiques et stratégiques, ni le simple bon sens.

Si les Alisiens consentent à aborder les points discutables : surfaces, périmètres, effectifs, c’est en recourant toujours à la même argutie : tout est relatif, et l’on ne doit pas faire fond sur les chiffres que donne César, forcément contingents ou arrangés pour les besoins de sa cause.

Jamais, en revanche, ne trouve-t-on effleurées les questions qui dérangent et constituent contre le dogme Alise des arguments sans appel. On préfère affirmer en fermant les yeux que les fouilles pratiquées autour d’Alise ont établi irrévocablement son identité « Alésia ».

Mais prend-on la peine de se demander si des fossés profonds de 30 cm peuvent arrêter une charge de cavalerie ? pourquoi César crut bon de faire fortifier 14 km pour encercler un monticule de 4,5 km de tour ? pourquoi les assiégés n’attaquèrent jamais que dans la plaine des Laumes, alors que l’absence de relief et l’éloignement des collines leur auraient permis de le faire  n’importe où ? comment l’armée de secours put parvenir au fossé de contrevallation sans percer les lignes romaines, puisque toutes les monnaies qu’elle perdit furent récoltées dans le fossé intérieur ? pourquoi les castella (camps en réduction pour postes de garde) destinés à protéger les légionnaires en train de construire les tours furent établis derrière les lignes au lieu de l’être devant ? 

Sans même évoquer le matériel hétéroclite qu’on fit sortir des fossés ou les erreurs de datation des armes – allant tout de même du Néolithique au Mérovingien et uniformément affectées à 52 avant J.-C.… – on se demande comment ces invraisemblances et tant d’autres n’ont jamais alerté l’attention des Alisiens. Sans doute ne jugeaient-ils pas prudent de réveiller le chat qui dort !

Notre Alésia, la Supercherie dévoilée, titre choisi par Franck Ferrand, s’attache donc à mettre en lumière tous les éléments dirimants pour la thèse Alise = Alésia, sans du tout aborder la thèse Alésia = Chaux-des-Crotenay.

Sans s’en aviser et avant même d’avoir ouvert le livre, tant les universitaires que les habitués des Forums réagirent, on peut dire : au quart de tour, tombèrent dans le piège et commentèrent allègrement et haineusement ce dont il n’était jamais question dans le livre dont ils étaient censés parler après, tout de même, l’avoir lu : la thèse Berthier… Attitude, on l’avouera, d’une puérilité déconcertante, qui témoigne d’une totale incapacité à répondre aux questions posées. Le dialogue de sourds, faut-il croire, continue !

Mais quand on veut porter l’estocade à l’ennemi, encore faut-il bien le connaître et surtout bien connaître le site qu’on s’emploie à dénigrer. Ont-ils jamais vu le site jurassien, ces fervents d’Alise ? Ont-ils même regardé une carte ou consulté, faute de mieux, wikipédia ? Non, certes. Et nous apprenons, par exemple, qu’on trouve la Chaux-des-Crotenay « près du village de Syam-Cornu » (Y. Le Bohec, Alésia, 2012, p. 100) alors que le village de Syam occupe la plaine du même nom ; les quelques maisons de Cornu la lisière de la forêt, en haut de la colline ; et l’agglomération de Chaux, la partie haute formant socle, in colle summo comme l’écrit César.

Chaux est donc descendue dans la plaine. Mais Syam peut aussi monter sur la colline, si l’on en croit J.-P. Demoule (On a retrouvé l’histoire de France, 2012, p. 206) pour qui A. Berthier aurait « avancé la candidature d’un autre lieu, le plateau de Syam sur la commune de Chaux-des-Crotenay, dans le Jura ». Syam est dans une plaine, non sur un plateau, en bas et pas en haut… Rien d’étonnant que M. Reddé puisse avancer contre la thèse Berthier cet argument que, faute de connaître les lieux, tous répètent en chœur : au site jurassien, il manque un oppidum et une plaine… Il nous paraît, à nous, qu'Alise aurait, elle, trop de plaine et pas assez d’oppidum !

Que peut-on lire dans notre Supercherie dévoilée ? des études très diverses touchant les exigences concrètes du siège aussi bien que ses aspects historique, militaire, philologique, l’examen des objets trouvés, les estimations de surfaces, de ravitaillement, de ressources en eau ; et la détermination, capitale et toujours occultée, pour cause, d’un lieu admissible pour y affecter le combat de cavalerie qui précéda l’arrivée sur et sous Alésia. L’ouvrage est un digest d’une première version qui couvrait, elle, plus de 900 pages, impubliable telle quelle, mais qui montrait que nous connaissions, nous, et dans le moindre détail, les travaux menés autour d’Alise, tant jadis que naguère.

*Préface de Franck Ferrand
*Le fil d’Ariane : l’histoire commence en -52  (Danielle Porte)
*Le pot de terre contre le pot de fer (texte ancien de Georges Colomb)
*Non, rien ne change… Les esprits indépendants, de 1962 à 2013  (Danielle Porte)
*À Alise, rien ne va plus  (Danielle Porte)
*Fouilleurs du sol, fouilleurs du texte  (Danielle Porte)
*Un sujet à creuser : le fossé de vingt pieds  (Éric de Vaulx)
*L’Ensemble monumental de la vallée de l’Ozerain  (Éric de Vaulx)
*C’est César qu’on assassine  (Danielle Porte)
*La petite maison dans le grand parc  (Régis Sébillotte)
*Géométrie de l’espace  (Yannick Jaouen)
*Le Treizième travail d’Hercule  (Bernard Gay)
*La Cabane au fond du jardin  (Bernard Gay)
*Remontons à la source  (Bernard Gay)
*Les pieds dans l’eau  (Jacques Rodriguez)
*Histoire d’eau et mathématiques agricoles (Yannick Jaouen)
*Que d’eau, que d’eau !  (René Marchand)
*Que d’os, que d’os ! les Chevaux d’Alésia  (Éric de Vaulx)
*Le Divin Kronos : amphores, monnaies, fibules (Arnaud Lerossignol)
*Les Surprises du chef  (Jacques Rodriguez)
*Jouons à la balle  (Yannick Jaouen)
*L’Vmbo de bouclier à ergot central  (Yannick Jaouen)
*Le Combat de cavalerie : la quadrature du cercle  (Régis Sébillotte)
*Pas l’ombre d’un combat  (François Chambon)
Conclusion  (Danielle Porte)

Chaque exposé est suivi d’un questionnaire attirant l’attention sur les points précis soumis aux Alisiens et leur demandant une réponse. Nous verrons dans quelques moments ce qu’on appelle « répondre », au doux pays d’Alise.

Et souhaitons, en ce jour de Pentecôte, que l’Esprit descende sur toutes les têtes rétives.



******

Précédait, l’an dernier, notre Supercherie dévoilée, mon Vercingétorix, celui qui fit trembler César, édité chez Ellipses et qui connut, malgré le silence sépulcral de toutes les revues d’histoire ou d’archéologie, un succès immédiat, preuve que la question « Alésia » existe toujours et passionne encore. Je me suis laissé dire, et de plusieurs côtés, qu’il était en vente à Saint-Germain-en-Laye.


       Et rappelons l'ouvrage de Jean-Paul Savignac, 
       le premier et jusqu’à présent le seul qui  ait osé 
       accorder au site jurassien un espace confortable 
       et un exposé objectif :          

                                               



Après le temps du silence et de la réflexion est venu celui de la contre-attaque. Le silence qui accueillera notre livre – sauf cris d’indignation des intellectuels mis en cause – sera, bien sûr, dédaigneux. Nous attendons, patiemment et sereinement, une réponse

Qui d’entre eux aura le courage de monter au créneau ?


 © D.P.